LES INFIRMIÈRES LUTTENT CONTRE GODZILLA

LES INFIRMIÈRES LUTTENT CONTRE GODZILLA
CHRIS HEDGES :
Par Chris Hedges, Scheer Post.
Le 5 août 2023

La grave pénurie d’infirmières dans les hôpitaux du pays a transformé cet emploi l’un des plus importants de la profession médicale en cauchemar. Devant ce désastre les infirmières d’un grand hôpital du New Jersey s’organisent...

NEW BRUNSWICK, N.J. -
Judy Danella, présidente de la section locale du syndicat United Steel Workers, qui représente plus de 1 700 infirmières de l’hôpital universitaire Robert Wood Johnson -
Une réunion se tient dans le sous-sol d’une église et devant une salle remplie de membres de son syndicat, sa voix tremble légèrement alors qu’elle annonce de graves nouvelles. La direction de l’hôpital, dont les cadres supérieurs gagnent des millions de dollars, a refusé de céder à l’une des principales revendications des infirmières. Vendredi, à 7 heures du matin, les infirmières se verront interdire l’accès à l’hôpital et se mettront en grève.

Mais ce n’est pas seulement la grève qui préoccupe Danella vêtue d’un bleu T-shirt sur lequel on lit : “Des effectifs stables sauvent des vies.”

“Je suis sure à 100 pour cent que l’objectif est de briser l’union,” dit Danella, qui a travaillé à l’hôpital pendant 28 ans. "Il s’agit de l’avenir des soins infirmiers.”

La principale ligne de front contre la tyrannie des entreprises ne passe pas par les urnes. Elle réside plutôt dans la lutte désespérée que mènent des personnes surchargées de travail et sous-payées pour empêcher les géants de l’industrie de transformer leur personnel en travailleurs intermittents dépourvus de prestations de santé et de retraite, de sécurité de l’emploi, de revenus durables ou de conditions de travail équitables. Les infirmières, malmenées par les exigences presque inhumaines qui leur ont été imposées pendant la pandémie, ont été particulièrement impactée. Près d’un tiers des infirmières du New Jersey ont quitté la profession au cours des trois dernières années (1).

“On est passé de héros à zéros,” dit Jessica Aquino, une infirmière qui a été à l’hôpital pendant plus de 16 ans.

La société RWJBarnabas Health (2)
Il est propriétaire de 12 hôpitaux 12 hôpitaux de soins intensif.
Dont l’hôpital universitaire Robert Wood Johnson, et quatre hôpitaux spécialisés. C’est le plus grand prestataire de soins de santé de l’État du New Jersey. Ses 37 000 employés, dont (3) 9 000 médecins, soignent plus de trois millions de patients par an. Son chiffre d’affaires annuel s’élève à 6,6 milliards de dollars (4). La société est enregistrée en tant qu’organisation caritative à but non lucratif (501(c) (3)).

Danella suspecte l’entreprise de tenter de rendre permanentes les conditions de travail éprouvantes et de poursuivre les réductions de personnel. Sans contrôle, elle continuera à augmenter les primes d’assurance, ce qui peut coûter 500 dollars par mois à une infirmière mère de famille. Ils refuseront d’augmenter les salaires, qui oscillent entre 43 et 64 dollars de l’heure, y compris le salaire dérisoire de 5 dollars de l’heure, que la direction de l’hôpital a proposé de porter à 6 dollars, pour les infirmières de garde en attente à la maison. Le syndicat a réclamé le salaire minimum pour les infirmières de garde et a ensuite proposé de baisser le montant horaire à 10 dollars. Les infirmières de garde reçoivent leur salaire normal une fois qu’elles ont pointé. Si les revendications syndicales ne sont pas satisfaites, elles se verront refuser les prestations médicales de retraite et les primes de maintien en poste. Le taux élevé de départs volontaires va se poursuivre.

Au moins 700 infirmières suppléantes, appelées "travelers" (5), originaires d’États tels que l’Alabama, le Mississippi, le Tennessee et le Kentucky, ont été transférées au Nouveau-Brunswick au cours des derniers jours et installées dans des hôtels de la région pour remplacer les infirmières grévistes. Ces personnes, payées jusqu’à 120 dollars de l’heure et bénéficiant d’indemnités de logement et de déplacement, gagnent plus que les infirmières syndiquées. Mais les "travelers" n’ont aucun contrôle sur leurs conditions de travail. Si le syndicat est démantelé, les profits réalisés grâce à la réduction des services et à la pénurie chronique de personnel compenseront largement leurs salaires plus élevés.

Les infirmières savent à quoi s’en tenir, d’autant que le bureau du gouverneur a annoncé qu’il resterait "neutre". Cette neutralité signifie que les tactiques musclées de Barnabas, notamment une campagne de propagande acharnée et des réunions publiques au sein de l’hôpital visant à monter les membres du syndicat contre sa direction, ne connaîtront pas de limites.

L’une des doyennes de l’école de médecine Robert Wood Johnson de Rutgers, le Dr Carol Terregino, a envoyé un courriel aux étudiants de deuxième, troisième et quatrième année de médecine pour leur demander de se porter volontaires en cas de grève des infirmières, une initiative qui s’est retournée contre elle. Elle a précisé que les étudiants "répondraient aux appels, prendraient des nouvelles des patients, et soutiendraient le personnel infirmier de remplacement".

Les étudiants en médecine ont refusé, répondant par écrit que

"La demande de travail non rémunéré pour des tâches auxquelles nous ne sommes pas formés, au détriment de notre propre programme d’enseignement, soulève des inquiétudes quant à une exploitation et risque de créer un environnement dangereux pour les patients".

Pendant ce temps, le Congrès se fait le complice des attaques contre nos soins de santé. Chaque solution proposée consiste à octroyer davantage de moyens et d’allègements fiscaux à l’industrie de la santé, qui finance abondamment les campagnes électorales du Congrès.

"Je crains qu’ils soient tellement saturés d’argent qu’ils vont essayer de nous affamer", a déclaré Sarah Caley, une infirmière en radiologie qui travaille à l’hôpital depuis plus de sept ans.
"Nous espérons qu’ils vont craquer, qu’ils ne font que parler, mais en fin de compte, c’est une goutte d’eau dans l’océan pour eux."

Le système de santé a augmenté les coûts à la charge des patients et réduit l’accessibilité des soins médicaux. En 1975, les États-Unis comptaient environ 1,5 million de lits d’hôpitaux pour une population d’environ 216 millions d’habitants. Aujourd’hui, avec une population de plus de 330 millions d’habitants, environ 925 000 lits (6) sont disponibles. Cinquante-six pour cent des Américains souffrent de dettes médicales et, pour 23 % d’entre eux, elles s’élèvent à 10 000 dollars ou plus, selon (7) une étude de l’Affordable Health Insurance. L’étude révèle que les consultations aux urgences ont contribué à l’endettement médical de 44 % des Américains. Quelque 330 000 Américains sont morts (8) pendant la pandémie faute d’avoir pu consulter un médecin à temps.

Mary Silvestre, qui travaille à l’hôpital depuis 23 ans explique :
"Dans l’unité d’oncologie, le ratio infirmières/patients est de un pour cinq. Lorsque vous administrez une chimiothérapie, vous devez revérifier la taille et le poids du patient, et ce alors que vous vous occupez d’un patient qui est en train de mourir. Vous essayez d’apporter un soutien affectif à cette personne et à sa famille tout en administrant la chimiothérapie. C’est très compliqué. Nous avons formé 10 infirmières l’année dernière. Cinq d’entre elles ne sont plus là.”

Les infirmières de l’unité de soins intensifs doivent souvent s’occuper de trois patients à la fois. Le syndicat demande un ratio de deux patients pour une infirmière dans l’unité de soins intensifs. Les autres ratios revendiqués par le syndicat varient en fonction du niveau des soins médicaux.

Les salles d’urgence sont de plus en plus souvent pourvues d’assistants médicaux plutôt que de médecins, dont les salaires sont plus élevés. Dans le même temps, de nombreuses fonctions autrefois exercées par des médecins ont été confiées à des infirmières. En raison de la forte rotation du personnel, des infirmières peu expérimentées occupent des postes à responsabilité dans les unités de soins intensifs et critiques, telles que les urgences. Les infirmières ont déclaré qu’elles venaient souvent travailler souffrantes pour épargner à leurs collègues en manque de personnel une charge de travail trop lourde.

Danella dit “C’est les profits avant les patients,”.

La mainmise des grands conglomérats et des sociétés de capital-investissement (9) sur le système de santé a engendré une crise du système de santé. Selon Becker’s ASC Review, la pénurie de personnel infirmier est à l’origine d’un décès hospitalier inattendu sur quatre, ou de blessures dues à des manquements. Une étude réalisée en 2021, indique (10) Becker’s ASC Review, "a montré que chaque patient supplémentaire victime d’une septicémie en milieu hospitalier faisait partie des 19 % de risques de mortalité à l’hôpital".

Pendant ce temps, les dirigeants de ces entreprises touchent des salaires mirobolants. En 2022, l’ancien PDG de Barnabas, Barry Ostrowsky, a perçu (11) plus de 16 millions de dollars. En 2020, les PDG de 178 grandes entreprises de soins de santé ont perçu collectivement (12) 3,2 milliards de dollars de rémunération totale, soit une augmentation de 31 % par rapport à 2019, le tout en pleine pandémie. Selon Axios, en 2020, le PDG de Cigna a empoché (13) 79 millions de dollars, celui de Centene (14) 59 millions de dollars et celui de UnitedHealth Group 42 millions de dollars de rémunération totale. Le PDG de Moderna, Stéphane Bancel, a encaissé plus de (15) 392 millions de dollars en vendant les actions qu’il détenait dans l’entreprise, en plus des 19,4 millions de dollars perçus l’année dernière. Il bénéficiera également d’une indemnité de départ - liée au cours de l’action Moderna - d’une valeur potentielle de plusieurs centaines de millions de dollars, une fois qu’il aura quitté l’entreprise. Moderna a reçu 2,5 milliards de dollars de fonds publics de l’administration Trump pour développer son vaccin Covid.
Lors d’une interview que j’ai réalisée avec le Dr Margaret Flowers (Physicians for a National Health Plan) sur The Real News Network. Elle m’a dit :
"Les primes d’assurance maladie continuent d’augmenter, les frais à la charge des patients aussi, on atteint là un nouveau degré de violence. À cause des fusions, les corporations
hospitalières gèrent leurs propres programmes d’assurance (16). Ils possèdent les laboratoires. Ils possèdent les cabinets médicaux.
C’est ce qui s’est passé dans le Maryland avec notre organisation à but non lucratif MedStar. Ils ont donné un préavis de deux jours à un hôpital qui accueille la
majorité de la population bénéficiant de Medicaid. Ils ont fermé tout le département pédiatrique, y compris les urgences pédiatriques, et le centre pour les enfants victimes d’abus."

Vous pouvez consulter l’intégralité de mon entretien avec le Dr Flowers (17).
Selon le Dr Flowers la solution, consiste à fournir une couverture universelle des soins de santé. À défaut, les choses ne feront qu’empirer.
Elle ajoute : "Nous gagnerons cette bataille de la même manière que nous avons gagné toutes les autres. Nous devons nous informer et informer les autres. La santé est fondamentale. Il n’y a pas de méthode graduelle pour y parvenir. Nous ne pouvons pas travailler dans le cadre d’un système à but lucratif pour résoudre ce problème. Nous devons nationaliser notre système de santé. Cela signifie qu’il faut totalement proscrire le profit. Malheureusement, les projets de loi actuellement examinés par le Congrès ne vont pas dans ce sens. Ils permettent aux entreprises à but lucratif d’opérer au sein du système, mais ce sont des parasites. Elles chercheront toujours à récupérer le maximum possible. Chaque dollar qu’elles empochent signifie un dollar de moins pour une personne bénéficiant des soins dont elle a besoin" .

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